
L’hybride : compromis entre thermique et électrique ?
Face à l’urgence climatique, les entreprises cherchent des solutions pour verdir leur flotte automobile tout en conservant efficacité et maîtrise des coûts.
Entre véhicules 100 % thermiques et voitures 100 % électriques, la voiture hybride apparaît souvent comme une alternative rassurante. Est-ce vraiment un bon compromis ? Quels sont ses avantages ? Ses limites ? Est-elle réellement pertinente face aux enjeux environnementaux, aux exigences réglementaires et au besoin d’efficacité économique ?
Décryptage complet.
Voiture hybride : définition simple
Une voiture hybride combine deux types de motorisation :
- Un moteur thermique, généralement essence,
- Un ou plusieurs moteurs électriques, alimentés par une batterie.
Il existe deux grandes catégories d’hybrides :
- Hybride classique (HEV) : la batterie se recharge uniquement via la récupération d’énergie (freinage, décélération).
- Hybride rechargeable (PHEV) : la batterie se recharge sur une prise ou une borne, et permet de rouler plus longtemps en mode 100 % électrique.
Sur le papier, un compromis intéressant entre autonomie et CO₂
C’est l’intérêt apparent de l’hybride : le meilleur des deux mondes.
Les points forts (en théorie) :
- Moins d’émissions qu’un véhicule thermique, surtout en usage urbain.
- Pas de stress d’autonomie.
- Pas besoin de bornes de recharge, pour les HEV.
Des émissions faibles… sur le papier
C’est le côté obscur des hybrides : les émissions annoncées sont souvent loin de la réalité.
Les tests d’homologation (NEDC ou WLTP) sont souvent faits dans des conditions idéales, en mode électrique maximal.
Mais dans la vie réelle :
- Les collaborateurs n’ont pas toujours le réflexe de recharger. Les tests NEDC considèrent que 69% des km parcourus par les véhicules hybrides sont parcourus en mode électrique. Mais une étude de l’ICCT relayée par Carbone 4, montre que dans la réalité, seulement 37% des km parcourus par les conducteurs de véhicules hybrides rechargeables sont parcourus en mode électrique. On tombe même à 20% pour les voitures de fonction !
- En l’absence de recharge, le véhicule roule surtout en mode thermique. Compte tenu du poids de la batterie, en plus de celui du moteur thermique, les émissions de CO2 réelles peuvent s’envoler, car le véhicule devient plus lourd, donc plus polluant.
- Selon une étude de la commission européenne, les voitures hybrides rechargeables neuves immatriculées en 2021 émettent en moyenne, en conditions réelles, 139,5 gCO2e / km, soit 3 fois plus que ce qu’indiquait l’essai WLTP (39,5 gCO2e).
- Selon une étude de ICCT & Fraunhofer Institute, relayée par Carbone 4, les émissions réelles des véhicules hybrides rechargeables sont 2 à 4 fois supérieures aux émissions annoncées.
Résultat : 3 fois plus d’émissions réelles que celles affichées par les constructeurs sur les hybrides rechargeables.
Résultat bis : des émissions réelles seulement 15 à 20% inférieures aux émissions d’un véhicule thermique équivalent sur l’ensemble du cycle de vie (vs. 60 à 70% inférieures pour un véhicule 100% électrique).
Moralité : pour que l’hybride soit un vrai levier carbone, il faut impliquer les conducteurs pour qu’ils rechargent leurs véhicules et suivre les usages de près.
Hybride : quelle équation économique ?
Les véhicules hybrides bénéficiaient jusqu’à récemment d’aides fiscales significatives. C’est de moins en moins le cas.
Le meilleur exemple, car le plus impactant sur le coût complet du véhicule, est celui des avantages en nature (AEN). Seuls les véhicules électriques éco-scorés sont désormais éligibles à des abattements significatifs sur le calcul des AEN pour les véhicules de fonction. Les véhicules hybrides ne sont plus éligibles.
Résultat : entre une consommation de carburant bien supérieur à ce qui était prévu (dans le cas notamment d’un véhicule hybride rechargeable peu rechargé) et une fiscalité de moins en moins avantageuse, le TCO des voitures hybrides peut s’envoler.
Quelle place pour l’hybride dans une flotte d’entreprise ?
L’hybride est souvent présenté comme un outil de transition ou comme un bon compromis entre électrique et thermique.
Que ce soit du point de vue des émissions de CO2 ou du point de vue économique, l’hybride est de moins en moins pertinent face à l’électrique.
Il en va de même pour les usages. Pour la vaste majorité des conducteurs, l’électrique est une solution très crédible. Pour les autres, ceux qui roulent beaucoup chaque jour, avec des solutions de recharges soit très coûteuses soit peu adaptées, le thermique ou l’hybride peuvent être une solution, mais doivent rester l’exception.
En résumé
Bien qu’ils soient souvent présentés comme tels, les véhicules hybrides ne nous semblent pas être le compromis idéal entre électrique et thermique. Pourquoi ?
- Le TCO des véhicules électriques est de plus en plus compétitif, dans la majorité des cas plus compétitif que les véhicules thermiques et hybrides équivalents (au moins pour les véhicules de fonction)
- Les émissions de CO2 des véhicules électriques restent imbattables, même sur l’ensemble du cycle de vie : 60 à 70 % d’émissions en moins sur son cycle de vie (vs. 15 à 20% pour l’hybride)
- La crainte quant à l’autonomie des véhicules électriques est souvent exagérée quand on analyse finement les usages réels des conducteurs.
- Les constructeurs accélèrent le virage vers le tout électrique.
- Les réglementations se durcissent.
Pour une flotte qui vise performance, impact et conformité, le choix le plus logique, au moins au niveau des véhicules de fonction, est le véhicule électrique, avec un accompagnement des usages et des conducteurs. Le thermique et l’hybride doivent rester des choix par exception.